Pile ou face: mourir de rire ou de peur? – Partie 1
Une femme vient de terminer ses courses. Au comptoir libre-service d’un restaurant, qui est situé au centre commercial, elle achète un bol de soupe, va s’installer à une table, y dépose son plateau et s’aperçoit qu’elle a oublié de prendre une cuillère. Elle repart en direction du comptoir.
Revenant à sa place, elle trouve un homme au-dessus du bol, trempant sa cuillère dans le bouillon.
« Quel sans-gêne! » Mais il n’a pas l’air méchant…
« Vous permettez », lui dit-elle, en tirant la soupe de son côté. Son interlocuteur lui répond par un large sourire. Elle commence à manger.
L’homme retire le bol vers lui et le positionne au milieu de la table. À son tour, il plonge sa cuillère et avale le breuvage, mais avec tant d’amabilité dans le geste et le regard qu’elle le laisse faire, désarmée. Ils mangent à tour de rôle. Elle est décontenancée. Son indignation fait place à la surprise. Elle se sent même un peu complice.
La soupe terminée, l’homme lui fait signe de ne pas bouger et revient avec une abondante portion de frites qu’il pose au milieu de la table. Il l’invite à se servir. Elle accepte et ils les partagent. Puis, il se lève pour prendre congé, avec un ample salut de la main, et prononce un aimable « Merci! »
Elle reste assise un long moment pensive, et songe à s’en aller. Elle cherche des yeux son sac à main qu’elle avait accroché au dossier de la chaise. Plus de sac! « Quelle imbécile je suis! Cet homme n’était qu’un voleur évidemment! »
Elle s’apprête à demander qu’on le poursuive lorsque ses yeux tombent sur un bol de soupe, intacte et froide, posé sur une table voisine devant la chaise où pend son joli sac. Étrangement, il manque une cuillère sur le plateau!
Citation:
« Souvent, au moindre écueil, nous rétrécissons notre vision. » — Tenzin Gyatso, quatorzième dalaï-lama
Je dois l’avouer, j’ai hésité un moment avant de laisser l’élan de mon intuition guider la rédaction de cet article. « L’histoire est un perpétuel recommencement », comme le disait Thucydide. La pandémie actuelle n’est pas étrangère à ce que nous connaissons déjà. Chaque jour, chaque heure et même chaque minute, tout est recommencement; un nouveau départ s’offre à nous si, et seulement si, nous en sommes suffisamment conscients.
Pour tout vous dire, les cinq derniers mois m’ont permis d’élargir la perspective de mes clients et de capter très rapidement le voyant lumineux qui s’affichait sur notre tableau de bord collectif. En fait, je suis reconnaissante d’avoir pu comprendre cet avertissement tôt plutôt que tard.
Face à la COVID, nombreux sont les hommes et les femmes qui vivent avec une charge mentale augmentée malgré le slogan « Ça va bien aller ». En fait, il est démontré que le burnout estival existait bel et bien avant la pandémie.
Avec le brouhaha du télétravail qui fait des siennes, les personnes vivent au quotidien la réalité augmentée, sans toutefois avoir accès à la réalité de la situation dans son ensemble. Plusieurs restent figées dans leurs habitudes bien ancrées et tentent de trouver le coupable ou de s’extirper de la situation sans trop de dégâts. À qui la faute, me direz-vous?
Bien que des gens pensent détenir la vérité sur ce qui se passe, ils doivent se montrer prudents face aux certitudes que l’illusion de la perception d’une situation engendre chez eux. Il est de notre responsabilité collective de rester vigilant quant à nos propres discernements et de devenir curieux, très curieux, je dirais même.
Souvent, le réflexe humain est de chercher le problème à l’extérieur de soi. Bien sûr, notre mental est réfractaire à tous ces changements qui ont cours à cause de la COVID, sans compter que notre corps réagit à tout ce que nous vivons. Il attire notre attention pour nous expliquer le conflit que nous sommes en train de vivre, entre nos désirs, nos projets, nos priorités et nos peurs. C’est pourquoi j’aimerais expérimenter la virtualité de la peur avec vous. Après tout, ça ne changera pas le monde, sauf que…
Les parties 2 et 3 du texte Pile ou face: mourir de rire ou de peur? de Nadine Beaupré seront publiées les 27 août et 14 septembre respectivement.