Faire le diagnostic juridique de son entreprise : êtes-vous à risque ?

Votre avocat est à votre entreprise ce que votre docteur est à votre corps, ou votre dentiste à votre bouche. La plupart des gens attendent d’avoir un mal de ventre ou de dents pour consulter. Souvent, ils apprennent alors que s’ils avaient agi plus tôt, les conséquences auraient été beaucoup plus faciles à limiter.

De la même façon, les petites entreprises vont généralement consulter un avocat en réaction à un problème juridique lorsque celui-ci se présente plutôt que de faire affaire avec un conseiller de manière préventive. Pourtant, tout comme pour votre problème de santé, l’investissement nécessaire à la bonne santé juridique de votre entreprise est de loin inférieur aux coûts et aux risques d’attendre l’inévitable pour réagir.

Lorsque le budget est un enjeu, il est important d’au moins prendre un pas de recul dans nos journées bien remplies pour analyser nos relations d’affaires et vérifier nos zones de risques. Bien que la notion de diagnostic juridique soit très large, la présente chronique ne traitera pas des questions de conformité réglementaire ou de propriété intellectuelle, elle visera spécifiquement la santé contractuelle de votre entreprise.

Tel que vous avez pu le lire dans l’une de nos dernières chroniques « Pourquoi signer un contrat ? », une poursuite judiciaire au Québec coûte très cher. C’est pourquoi il est essentiel de mettre par écrit les ententes importantes pour votre entreprise. Même si vous êtes encore en démarrage, ces ententes seront généralement nécessaires afin de sécuriser vos futurs investisseurs quant au soutien de votre projet par des bases solides.

Étape 1 : Assurez-vous que les gros montants sont sécurisés

La plupart des entrepreneurs ont le bon réflexe de demander à un avocat de préparer un contrat lorsque les montants en jeu sont significatifs. Si l’un de vos clients désire passer une commande qui hypothéquera vos ressources pendant trois (3) mois, ou si le montant en jeu dépasse vos revenus mensuels, il est important de faire préparer une entente. Un contrat, même très simple, permettra de mettre par écrit la transaction et de sécuriser vos investissements contre les imprévus.

Étape 2 : Identifiez les ententes fréquentes pour votre entreprise

Que ce soit avec vos clients ou des sous-traitants, toute entreprise finit tôt ou tard par avoir des relations d’affaires multiples qui se ressemblent. Trop souvent, les entrepreneurs ne préparent pas de contrats pour une transaction impliquant un petit montant. Par contre, lorsque la transaction est répétitive, le risque est augmenté d’autant.

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Crédit photo: Freddie Collins

Par exemple, la rédaction d’un contrat de service pour une somme de 500 $ peut sembler excessive, mais lorsque votre entreprise dépend de ces contrats, et qu’elle en signe environ 1 000 par année, c’est une valeur de 500 000 $ d’ententes non signées qui sont à risque. Si un problème se pose de manière généralisée, cela peut avoir un impact non négligeable sur vos finances. Il est important de mentionner que ce « contrat » n’a pas à être rédigé sur 30 pages. Un bon de commande accompagné de termes et de conditions générales peut souvent faire l’affaire, surtout que cette méthode permet de réutiliser le modèle préparé par votre avocat sans frais supplémentaires.

Étape 3 : Vérifiez vos ententes à long terme

Évidemment, lorsque vous signez, par exemple, un bail commercial de cinq (5) ans ou une licence d’utilisation de propriété intellectuelle, il est excessivement important de vous assurer que cette entente soit écrite. La mémoire étant une faculté qui oublie, vous éviterez ainsi plusieurs mots de tête dans le futur. Cela permet également de prévoir les éventualités où le passage du temps viendrait à changer la situation factuelle existant entre les parties.

Souvent, ce type d’entente est soumis aux petites entreprises par l’autre partie. Il est crucial de ne pas apposer sa signature sur ces ententes avec une confiance aveugle, et de connaître les limites de son expertise.

Trop de clients m’apportent un bail commercial à long terme signé sans consulter, et il n’est pas rare d’y retrouver toutes sortes de clauses abracadabrantes. Parfois, je dois expliquer à mes clients que même si une météorite tombe sur l’immeuble, ils seront responsables d’effectuer les réparations. Imaginez, avec les inondations de plus en plus fréquentes au Québec, être forcé de payer les frais des dommages causés à l’immeuble en plus de n’avoir aucun recours contre le ralentissement de vos affaires ni aucun rabais sur le prix de votre loyer mensuel, et ce, malgré qu’il y ait un pied d’eau dans vos locaux…

Quand le contrat est long, et qu’une clause dérange, elle dérange longtemps.

Étape 4 : Mettez vos partenariats par écrit

L’un des plus grands risques pour une jeune entreprise est de voir un partenariat important prendre fin. On parle ici de votre relation avec vos actionnaires et associés, de vos contrats avec vos employés ou avec une autre entreprise.

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Crédit photo: Aaron Burden

Ces relations, en plus d’être excessivement importantes pour le futur de votre entreprise, demandent de prévoir plusieurs détails sur les prestations de chaque partie, l’investissement attendu pour le présent et pour le futur et, surtout, les modalités qui régiront la fin éventuelle du partenariat. Considérant les coûts de faire rédiger une convention d’actionnaires par un avocat, en relation avec le risque de ne pas en détenir une, je suis régulièrement abasourdi de rencontrer des entrepreneurs étant en affaires depuis plusieurs mois, voire quelques années, et qui n’ont même pas amorcé leurs discussions sur le partenariat.

« Notre entente est très simple, on partage tout 50/50. »

« On s’entend très bien et on n’a jamais eu de problème à faire affaire ensemble. »

Ces déclarations d’optimisme me ramènent systématiquement aux clients qui, une fois dans mon bureau avec un problème majeur entre les actionnaires, s’exclament : « Si on avait su… »

Conclusion

Pour finir, lorsque vous aurez identifié les zones à risque pour votre entreprise, nous vous invitons évidemment à consulter un conseiller juridique afin d’avoir en main des ententes qui protègent les actifs que vous vous efforcez d’amasser. Lorsque le budget est limité, il est toujours possible de préparer vous-mêmes vos ententes grâce à des modèles de contrats. À ce sujet, nous vous invitons à consulter notre autre blogue sur les 4 pièges à éviter.

Crédit photo à la une: Maarten van den Heuvel

Anthony Quevillon

Avocat en droit commercial pour PME depuis le début de sa pratique, Anthony spécialise en droit corporatif, litige commercial et propriété intellectuelle. Passionné d’entreprenariat, il est également impliqué un peu partout dans le milieu des start-up québécoises.

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