Pour en finir avec le pseudo-miracle de la « comfort zone »
Les discussions sur le leadership s’orientent un peu trop souvent autour de phrases creuses : « Aie confiance en toi », ou encore, « Sors de ta zone de confort ». Ces expressions renferment évidemment (enfin, la plupart du temps) une part de vérité… Cependant, elles suffisent rarement à nous aider à progresser et à évoluer.
L’idée miracle qui me choque le plus a trait à cette invitation générale à sortir de notre zone de confort et à dépasser nos limites… Quelle sottise! Qu’est-ce qu’une zone de confort, d’abord? Quand doit-on considérer qu’on en « sort » ? Par le feeling? Par ce que les autres en disent ? Qu’est-ce que ça fait réellement d’être et d’agir hors de la zone de confort? Quels sont les repères au juste?
Personnellement, je crois que l’apprentissage est plus complexe et plus subtil. Progresser, évoluer, performer, particulièrement en affaires, exige la succession répétitive de plusieurs phases : entraînement, retrait, succès, échec, performance. Dans cette optique, je considère que les principes de zone de confort et de dépassement des limites sont galvaudés et surestimés.
Apprendre quand, comment et pourquoi se mettre en danger
La joute des affaires est un sport « sans filet de sécurité ». Comme entrepreneur, on se définit souvent comme celui qui va au front, celui qui cherche et qui traque les nouvelles opportunités, les ventes, le développement des affaires. On peut même se qualifier d’overachiever (dixit Tony Robbins).
C’est une bonne idée de ne pas se laisser guider uniquement par la peur, mais cela ne veut pas dire de l’ignorer pour autant. Sortir de sa zone de confort peut être une stratégie gagnante si on est dans de bonnes conditions (ce qu’on pourrait qualifier de « risque calculé »). Toutefois, avant de se lancer dans l’arène, il faut s’entraîner et se pratiquer « avec filet de sécurité ».
Par exemple, si on essaie un nouveau service, on peut baliser notre investissement et nos ressources en y accordant un nombre d’heures maximal ou en ne l’offrant qu’à un seul client en qui on a confiance et qui sera franc dans son appréciation. Je suis d’accord avec l’idée d’innover, de faire plus qu’hier et moins que demain, mais il faut aussi garder l’enthousiasme et la passion de notre équipe et de nos leaders.
Apprendre quand, comment et pourquoi se mettre à l’abri
D’ailleurs, à titre de consultante, il n’est pas rare que je rencontre des dirigeants à bout de souffle… Heureux, engagés, mais tout de même à bout de souffle. Car, évidemment, sortir de sa zone de confort et se mettre en danger, c’est très énergivore.
Pendant mon expérience de survie et de tribu nomade dans le bush africain, j’ai pris conscience que « se mettre en danger » n’est pas toujours la bonne stratégie — et certainement pas la seule et unique —, qu’il faut parfois prendre du recul et que, même si on est le leader, on peut demander à l’équipe de nous relayer « au front ».
Se comprendre, connaître sa tribu et son environnement pour survivre. Des thèmes explorés pendant l’expédition de survie et de tribu nomade en Afrique du Sud organisée par Communication Psycom. Crédit photo : Guillaume Beaudoin
La survie — et l’entrepreneuriat —, ce n’est pas pour les faibles (une autre belle phrase creuse) ;). Il est important d’apprendre à s’observer avec franchise et à savoir reconnaître son état, qu’il soit courage, force ou vulnérabilité, car il se peut qu’à un certain moment, s’avouer fragile demeure la seule stratégie efficace et intelligente.
La bonne affaire, pour moi, ici et maintenant
Je crois qu’il y a un temps pour tout. Innover. Se mettre en danger. Être conservateur. Se mettre à l’abri. Chaque fois, il faut chercher à comprendre ce qui nourrit — consciemment et inconsciemment — nos choix. Puis, les valider et observer s’ils sont effectivement en cohérence avec l’identité des gens et la raison d’être de l’organisation qui les portent.
Survivre, croître et prospérer, particulièrement en affaires, requiert une multitude de stratégies, notamment celle de « sortir de sa zone de confort ». Toutefois, si cette dernière est votre unique stratégie, vous courez à votre propre perte. La clé ? Se comprendre, connaître sa tribu et son environnement pour choisir la stratégie appropriée pour vous, ici et maintenant.