La déloyauté dans l’industrie du voyage
« Le voyagiste qui vend en direct est déloyal, tout comme l’agence qui sollicite d’autres clients ». Ce type d’affirmations enflamme les discussions entre professionnels du voyage. On déplore les changements de l’industrie, on dénonce les pratiques de la concurrence et on ne comprend plus les choix des clients. Ces voix découragées expriment un certain abattement vis-à-vis de la réalité de l’industrie du voyage d’aujourd’hui. Justement, dans cet article, je touche à ce sujet tabou qui exprime une crainte collective : se réveiller un matin et n’avoir aucun client qui frappe à sa porte.
Un seul permis pour tous
Il fut un temps où l’Office de la Protection du Consommateur (OPC) délivrait aux professionnels du voyage deux permis distincts qui définissaient les rôles des intermédiaires en voyage : le voyagiste commercialise ses produits uniquement auprès des agences de voyages (vente B2B); l’agence de voyages les distribue uniquement aux clients particuliers (B2C). Or, depuis déjà plusieurs années, un seul permis est délivré par l’OPC, le « permis d’agent de voyages général » qui, lui, ne spécifie pas de différence entre les activités d’un voyagiste et celles d’une agence de voyages.
Ce permis offre plus de latitude et par conséquent, plus d’opportunités aux deux types d’entreprises. Qui dit plus d’opportunités dit plus de zones conflictuelles. Le fait que les voyagistes ouvrent leurs portes aux clients particuliers, que les agences de voyages puissent avoir accès aux clients des autres agences et que le client ait la liberté de faire affaire avec le professionnel de son choix crée un environnement dans lequel chaque intervenant peut faire ce qui lui semble juste. Mais lorsqu’on ne comprend pas que sa clientèle s’arrête là où commence celle d’autrui, rien ne va plus!
C’est là que ça fait mal. Alors que certaines entreprises s’efforcent de conserver un comportement éthique et respectueux vis-à-vis des autres intervenants, d’autres sollicitent les clients sans égard pour les autres. Elles offrent des avantages financiers pour les transactions faites en direct et réduisent, voire suppriment, les commissions versées aux agents qui revendent leurs produits. Bref, il y a de quoi décevoir plusieurs professionnels du voyage. Ces pratiques hantent et frustrent l’industrie du voyage. Elles sont sur toutes les langues et soulèvent l’indignation. Il y a même eu des boycottages et des vagues de dénonciations.
En réalité, même si ces pratiques sont frustrantes, elles ne sont en aucun cas illégales. Les dénoncer n’aura donc pas d’incidence notoire. Les permis de ces entreprises resteront valides, leurs stratégies d’acquisition de clients continueront et deviendront peut-être même plus agressives. En d’autres mots, se concentrer sur autrui ne dissuadera pas cette clientèle de changer d’avis.
S’interroger
Ce qui doit réellement inquiéter un entrepreneur et le pousser à revoir ses plans, c’est la décision prise par son client d’aller voir ailleurs. La perte des clients devrait régulièrement faire l’objet d’autopsie pour déceler et corriger les raisons qui les ont poussés à partir. Rejeter la faute sur des éléments extérieurs et véhiculer un message négatif n’encourageront pas de nouveaux clients à faire affaire avec soi.
Quelle que soit l’industrie, ce qui différencie réellement les entreprises, c’est leur adaptabilité aux nouveaux environnements. Le soin qu’elles apportent à peaufiner leurs stratégies d’affaires ainsi que leur service à la clientèle sont également des éléments cruciaux. Il faut se poser les bonnes questions, innover constamment et bien connaître ses clients pour toujours trouver le moyen de les séduire. Un client comblé n’ira jamais voir ailleurs.