Ces entrepreneurs qui réinventent les magazines
L’omniprésence du digital a changé radicalement le paysage de la presse depuis plusieurs années. Pourtant, malgré ce contexte peu enclin à voir apparaître de nouvelles publications, des entrepreneurs passionnés n’hésitent pas à se lancer sur ce marché en y apportant un souffle de fraîcheur. Loin des articles couvrant l’actualité au sens large et aux pages de publicité à foison, ils ont pour mission de proposer une réelle expérience littéraire et visuelle à des lecteurs de plus en plus désireux d’accéder à un contenu ciblé et riche de sens. Zoom sur ces entrepreneures et entrepreneurs qui réinventent les magazines…
© En haut à gauche et en bas à gauche : Lentement / à droite : Caribou
La nouvelle génération
Elles ne cherchent pas à plaire au plus grand nombre, mais bien à répondre aux attentes de lecteurs et lectrices intéressés par un thème précis. Ces nouvelles publications ont pris le pari de réaliser des éditions riches de contenus spécifiques, travaillés et analysés par des expertes et experts dans leur domaine, offrant à la lecture, une expérience hautement qualitative et remettant en perspective le mode de pensée et d’information auquel nous étions habitués auparavant. Notons que, visuellement, la nouvelle génération se distingue sur les présentoirs avec des couvertures très soignées, attirant l’œil instantanément. Cette combinaison de visuels travaillés et de contenus d’une qualité irréprochable qui ne cesse de grandir confère à ces nouveaux magazines une place de choix auprès de lectrices et lecteurs en recherche d’expérience complète.
Une autre notion importante liée directement à ces entrepreneures et entrepreneurs est leur envie, au départ, de créer un produit répondant à un besoin, une thématique faisant jusque-là défaut sur le marché. Prenons l’exemple du magazine Lentement créé par Andréann Lune et né de l’envie de promouvoir les modes de vie alternatifs, le slow living, offrant ainsi aux lecteurs de nouvelles pistes à explorer, expliquées par des personnes les ayant implémentées dans leur quotidien.
« Je crois fermement que si quelque chose dont tu as besoin n’existe pas, crée-le! »
Andréann Lune, fondatrice de Lentement
Même constat au sein de la rédaction du magazine Caribou, qui, intéressée par la nourriture et l’achat local, a eu l’idée d’aborder ces sujets dans un média. Véronique Leduc, co-fondatrice du magazine explique : « Nous trouvions qu’il manquait d’espace dans les médias pour réellement parler des artisans et des producteurs d’ici. Avec Caribou, nous avons cherché à répondre à une mission, celle de faire connaître et rayonner la culture culinaire québécoise dont la plupart des gens semblaient au départ douter de l’existence. »
La nouvelle génération de magazines a donc à cœur de promouvoir une information de qualité, ciblée et proposant au public une nouvelle façon d’aborder le quotidien, la culture et la lecture.
Publicité or not publicité?
Outre une nouvelle manière de diffuser l’information, ces entrepreneurs-rédacteurs font face à un nouveau modèle financier. En effet, la presse traditionnelle s’appuie sur des annonceurs pour des pages publicitaires prenant une importante part de leurs publications. Les nouveaux magazines quant à eux, misent sur la non publicité ou alors, lorsqu’ils y font appel, choisissent de l’inclure de façon non inclusive dans leur contenu, offrant, là aussi, une nouvelle expérience tant aux lecteurs qu’aux annonceurs.
Ne pas vendre d’espaces publicitaires rend quelques fois le travail plus délicat, ce qui est le cas pour le magazine Lentement, dont la fondatrice Andréann Lune en a fait le choix : « Lentement n’a aucune publicité à l’intérieur. C’est un choix très personnel, qui rend les choses plus difficiles, mais qui est réalisable grâce aux collaborateurs et collaboratrices offrant gratuitement du contenu. ». Autre magazine, autre façon de procéder avec Caribou, qui, lui, a décidé de vendre de la publicité dans son édition papier ainsi que sur son site Web. Véronique Leduc explique : « Ce n’est pas un milieu facile, mais grâce à des partenariats et une reconnaissance en augmentation, nous arrivons à tirer notre épingle du jeu. » Des choix très différents, qui jouent un rôle important dans la continuité des projets de ces publications et à terme, de leur pérennité.
Le choix du papier
Jeunes trentenaires, ces entrepreneures et entrepreneurs bercés par le numérique, ressentent néanmoins le besoin de garder le papier comme support de prédilection de leurs magazines soignés et travaillés dans les moindres détails.
Le papier leur confère un impact supplémentaire quant à la qualité visuelle qu’ils offrent. Pour le magazine Lentement et sa fondatrice, ce choix était évident, notamment pour le rendu et la valorisation des photographies et illustrations, mais également pour le contrôle de grandeur et de format. Choix identique pour les membres de l’équipe de Caribou qui, même s’ils étaient pris pour des fous au départ de vouloir faire du papier, ont tenu bon.
Notons que la majorité de ces nouveaux magazines sont imprimés sur du papier recyclé. Leurs contenus associés à une impression de qualité, offrent également l’occasion aux lectrices et lecteurs de collectionner ces publications comme de véritables livres-objets. L’expérience littéraire continue bien au-delà de l’achat et de la première lecture.
« Selon nous, nous passons déjà tellement de temps devant nos écrans qu’il est plus agréable de lire sur du papier une fois la journée de travail terminée. ».
L’équipe du magazine Caribou
Des lecteurs et collaborateurs engagés
Une des choses les plus remarquables concernant cette génération prometteuse réside à ne pas douter dans l’attachement indéfectible d’une communauté de lecteurs et de collaborateurs engagés et prêts à soutenir leur publication favorite, le tout en véhiculant des valeurs fortes et identifiables. Ces nouveaux magazines bénéficient d’un bouche-à-oreille et d’interactions constantes sur les réseaux sociaux, mais également du soutien de lectrices et de lecteurs qui n’hésitent pas à payer plus cher une publication qu’ils jugent de qualité.
Un soutien apporté également par l’aide précieuse de collaboratrices et de collaborateurs qui donnent du temps et du contenu, quelques fois même sans autre rémunération qu’un exemplaire de l’édition dans laquelle ils paraissent.
Avec des titres comme Lentement, Caribou, Beside, Trois Fois Par Jour, ou encore, Planète F, le Québec a toutes les cartes en main pour faire rayonner la presse papier pour de très belles années encore.
(https://www.lentement.co – https://cariboumag.com)