Enjeux et opportunités du facteur ROPO

Pour ce billet moins technique que ce que je vous propose habituellement, je souhaite aborder une tendance inhérente au commerce électronique et au commerce de proximité : le facteur ROPO (Research Online, Purchase Offline) ou ROBO (Research Online, Buy Offline), soit Recherche en ligne, Achat Hors ligne (en point de vente physique), qu’on appelle aussi « webrooming ».

Ce phénomène ne concerne bien évidemment pas les « pure players » du Web (ceux qui ne disposent pas de point de vente physique et qui vendent seulement par Internet).

Cet acronyme désigne un parcours d’achat particulier du consommateur où celui-ci va d’abord effectuer des recherches en ligne sur le produit qu’il souhaite acheter pour finaliser son achat en magasin. Avec l’explosion du mobile, ce phénomène est encore plus vrai. Il est dorénavant très facile de consulter des informations sur un produit via son cellulaire ou sa tablette lors de micromoments (terme cher à Google que j’aborderai en détail dans un prochain billet) pour se rendre l’acheter ensuite en boutique.

Voyons d’abord, sans être exhaustif, ce qui favorise ce comportement des consommateurs :

  • Éviter de payer des frais de port ;
  • Connaître les informations du commerce le plus proche (horaires, téléphone, etc.) ;
  • Disposer du produit immédiatement sans attendre la livraison ;
  • S’assurer de la disponibilité du produit avant de se déplacer ;
  • Avoir des avis d’autres acheteurs sur Internet avant l’achat ;
  • Avoir des avis de spécialistes sur Internet avant l’achat ;
  • Avoir l’avis du conseiller en magasin après avoir identifié le produit sur Internet ;
  • Pour consulter et comparer les prix avant l’achat ;
  • Pour bénéficier de dispositifs marketing Web-to-store mis en place par les commerçants (coupons rabais téléchargeables et utilisables offline par exemple) ;
  • Pour tester, voir, toucher le produit réel en magasin ;
  • Réserver un produit et le récupérer en point de vente ;
  • etc.

Débutons par l’enquête sur les habitudes globales de recherche et d’achat des consommateurs au Canada, réalisée en 2014/2015 par Google.

enquete

Source : https://www.consumerbarometer.com/en/insights/?countryCode=CA

  1. ROPO au Canada et au Québec

À titre indicatif, et selon l’étude The Internet Economy in the G20 menée par Boston Consulting Group, le facteur ROPO au Canada était en 2010 de 3,2 x le volume d’affaires conclues en ligne. Ces chiffres ont bien entendu évolué depuis six ans.

tableau 1

Source : https://www.bcgperspectives.com/

L’étude du CEFRIO « Le commerce électronique au Québec : une forte croissance en 2015 », estime à 8 milliards de dollars les dépenses totales des Québécois sur le Web en 2015 (versus 6,6 milliards en 2014). Le facteur ROPO représenterait 65 % contre 55 % pour le « showrooming » (pour rappel : recherche en magasin, achat en ligne).

tableau 2

  1. Variabilité du phénomène ROPO

Le taux de ROPO peut fluctuer en fonction de nombreux critères liés à l’entreprise et à ses produits, mais aussi en fonction de sa géolocalisation (on n’a certainement pas le même taux de ROPO au Québec, en Ontario, etc.). En excluant le caractère géolocalisé du phénomène, ce taux peut varier en fonction de plusieurs facteurs comme :

  • la typologie, la complexité et le prix des produits ;
  • l’expérience d’achat sur le site Web du marchand (paiement, coût de livraison…) ;
  • l’expérience mobile ;
  • le nombre et la proximité de la ou des boutiques physiques ;
  • les délais et coûts de livraison.

3. Déterminer et optimiser le taux de ROPO

Un des enjeux pour le commerçant est de pouvoir déterminer de la manière la plus juste son taux de conversion lié au ROPO pour mesurer efficacement le ROI (retour sur investissement) de ses campagnes d’acquisition en ligne. Il n’existe malheureusement aucune manière naturelle de consolider les données online et les données offline de l’acheteur. Alors, comment faire ? Voici quelques exemples (certains sont plus simples que d’autres à mettre en place) :

  • Proposer des coupons de réduction en ligne et mesurer leur utilisation en magasin ;
  • Mesurer le trafic et soigner les pages du site Web dédiées aux points de vente (store locator, product locator), à l’évènementiel, etc. ;
  • Mettre en place des sondages clients ;
  • Mettre en place un numéro d’appel dédié au site Web ou un système de click-to-call sur le site Web ou via Google AdWords ;
  • Mettre en place un programme de récompenses et consolider les données off/online via un CRM (des entreprises proposent ce service) ;
  • Mettre en place un système de click-and-collect ou d’e-reservation.

4. L’effet ROPO inversé

Même si le taux est moindre, l’effet inverse existe aussi. On parle alors de Research Offline, Purchase Online. Appelé le « showrooming ». C’est une autre tendance du commerce électronique. Le consommateur choisi, essaie, touche, compare le produit en point de vente pour l’acquérir en ligne. Le problème pour le commerçant reste le même : mesurer et comprendre son taux de recherche hors ligne pour un achat en ligne et surtout faire en sorte que le consommateur aille acheter sur son site Internet (encore faut-il qu’il vende en ligne) plutôt que sur celui de son compétiteur.

Selon le baromètre Google, on voit qu’en 2014, 75 % des personnes interrogées qui ont recherché hors ligne ont acheté hors ligne, contre 15 % qui ont acheté en ligne.

tableau 3

Source : https://www.consumerbarometer.com/

5. Alors faut-il se débarrasser de son ROPO ?

Pour conclure, il n’est pas obligatoire pour un commerçant « clic et mortier » de vouloir se débarrasser de son taux de ROPO (pourtant on le retrouve sur de nombreux sites Web traitant du sujet, « comment éviter le ROPO », « diminuer son taux de ROPO », etc.), sauf si bien entendu cela fait partie de sa stratégie commerciale…

On entend aussi très souvent que la défaillance des détaillants qui ferment leurs boutiques physiques est due à l’essor du e-commerce, que pour un achat en ligne, c’est une vente qui est perdue pour un détaillant physique, etc. On le dit souvent, mais mieux vaut le répéter, le « hors ligne » et le « en ligne » ne sont pas en compétition et font partie d’un même écosystème, d’un même socle. Tout l’enjeu est de trouver l’alchimie parfaite entre les différents canaux de distribution.

Chers commerçants, ne vous ROPOsez donc pas sur vos lauriers ! 🙂

Sylvain Puccini

Directeur technique du RCEQ, développeur et entrepreneur Web, Sylvain cumule 15 années d'expérience dans la gestion et le développement de projets web éclectiques.

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Le Regroupement des Commerçants Électroniques du Québec - RCEQ a pour vocation de Regrouper, Développer et Représenter les commerçants électroniques d'ici.


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